Je marchais depuis un certain temps déjà, deux heures peut-être…
Soudain, il fut là devant moi comme une apparition.

- Il n’aurait pas dû se trouver là.
En Bretagne du Sud, on peut voir beaucoup de menhirs, alignés comme à Carnac, participant du même geste élancé qui les a fait naître, comme un appel du soleil, comme un message aux cieux, rassemblant leurs forces magnétiques conjuguées comme nos lointains ancêtres l’ont voulu, par respect et par foi.
On peut aussi voir des menhirs isolés, en terrain découvert. Cette situation leur donnent beaucoup de majesté : chacun d’eux est comme le centre d’un cercle, facilement imaginé, composé de fervents qui l’entourent rituellement.
Mais dans la forêt ?
Dans la forêt, découvrir une pierre levée, quelque soit sa dimension, fait surgir beaucoup d’émotion.
Comme je le fais souvent avec l’arbre de mon choix, j’avance vers la pierre et je l’enlace.
La sensation est bien différente.
Avec l’arbre, cette étreinte est charnelle.
L’écorce de l’arbre est tempérée, et pleine d’odeurs exquises. Le tronc de l’arbre bouge, les feuilles s’expriment en bruissements variés. On peut se sentir à la fois bercé et revigoré.

- Le Vieux Sage
Avec la pierre, la sensation est magnétique au sens premier du terme.
C’est d’abord aux pieds, sous les semelles, que l’on perçoit comme un petit grésillement.
Puis l’énergie se propage de bas en haut (par la ligne des chakras, ou des séphiroths selon l’imagination active à laquelle on aura recours), et explose dans la tête, en lotus aux mille pétales, ou en couronne.
La forêt, dans notre histoire, a précédé les pierres levées, l’un des premiers actes humains de haute culture.
Mais l’on sait depuis une dizaine d’années maintenant que les arbres « se parlent » et communiquent avec leurs semblables [1]. Et l’on connaît le pouvoir magnétique des pierres, pouvoir associé aussi à la qualité des lieux choisis pour les ériger.
Les mégalithes sont nos premiers temples…
Comment vit donc un menhir dans la forêt ? La communauté des arbres l’accepte, c’est certain : ils se portent bien ensemble.
Il m’amuse d’imaginer que la cohabitation, toutefois, ne fut pas facile…
La pierre dressée, parfois, s’habille d’un manteau vert, en signe de participation.
Tous ensemble, dans leur verticalité, relient les énergies de la terre et du ciel. Tous ensemble créent entre eux une demeure accueillante.
Et moi, promeneur amoureux, voilà que j’ai une raison supplémentaire pour rendre visite à ces forêts doublement enchantées…