Ils parlent de William Beckford... Souvenirs imaginaires...
Grâce à des textes parfaitement imaginaires écrits récemment par quelques passionnés de la vie et de l'oeuvre de William Beckford, laissez-vous conduire à travers l'Europe des XVIIIème et XIXème siècles à la rencontre de cet homme hors du commun.

Louisa Beckford, sa cousine

Lorsque je laissais exhaler mon coeur en proie aux étouffements de ma nature rebelle, je m'imaginais un monde où tout aurait été facile et doux, où l'on pourrait exprimer chaque débordement sans contrainte, sans pour cela être considérée comme excentrique ou sans vertu. Ce monde existait et c'était le vôtre, mon cher William, celui que j'avais découvert lorsque, après avoir été séduite par votre beauté rayonnante, j'avais été séduite par vos pensées rayonnantes. Mariée à votre cousin Peter Beckford, qui ne s'intéressait qu'à la chasse au renard, j'ai vécu, sans le savoir, dans l'attente de vous. Cette attente a cessé quand nos âmes se sont reconnues.

Nous avons passé des heures à nous écoutez parler l'un l'autre. Nous nous grisions dans ces échanges où tout semblait prendre des dimensions extravagantes, hors du temps, surnaturelles. Le goût que nous avions vous et moi pour le surnaturel nous a valu bien des jugements hâtifs. Mais savaient-ils tout ceux là de quoi nous parlions ? Nos mystères étaient ceux que vous aviez préparés, dans l'univers fertile de vos connaissances secrètes.

"Ami de mon âme, les sentiments étranges de nos coeurs sont la faute de la destinée", disait la princesse Firouzkah au Prince Alazi.

Lorsque vous m'avez écrit pour qu'absolument je vienne à Fonthill pour Noël, ce Noël, nous l'avons passé, isolés du monde extérieur, acteurs d'un long voyage de trois jours et trois nuits dans l'univers magique du rêve, descente au coeur de nos folies pour ceux qui ne savaient pas, ascension aux plans de conscience supérieur pour nos esprits passionnés. Compagnons de ce merveilleux voyage, votre cher Alexander Cozens et ses initiations orientales, William Courtenay, notre cher Kitty, la musique qui distillait ses envoûtements à travers ces merveilleux castrats, l'inégalable Pacchierrotti, Tenducci.. et Rauzzini...et la lumière artificielle de ce génial inventeur Loutherbourg.

Dans les volutes de l'encens des herbes aromatiques, du bois d'aloès qui brûlaient dans les cassolettes, toutes ces enfilades de pièces furent transformées en labyrinthe où les plus terribles mystères pouvaient prendre naissance.

Nous avons vécu en raccourci tout ce qui ne nous était pas permis de vivre dans cette société qui semblait ne pas être la nôtre. Sommes-nous nés trop tôt, mon cher William ?

Et bien que notre relation ait été placée sous le signe de l'amour, nos coeurs ont vibré aux mêmes harmonies mais n'ont pu jouer la même mélodie. Les Parques avaient tissé d'autres projets pour nous et nous avons dû être séparés et vivre chacun nos existences. Moi, dans l'attente de vous ou tout au moins de vos lettres, et la maladie que je croyais sans cesse conjurer mais qui ne lâcha pas prise, goule effrayante et affamée.

Vous, dans les méandres qu'avait forgés votre mère pour assurer votre position sociale et votre désir de ne suivre que votre liberté. Moi, votre bien-aimée Louisa, je n'ai cessé de vous aimer jusqu'à ma mort et c'est sans regret que cet amour je l'ai sans cesse nourri peut-être d'espoirs vains, peut-être de certitudes que seul votre coeur connaissait.




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