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Alors qu’en fait, quand vous étiez petit, plus jeune, vous auriez pensé être prêtre.
Peut-être. Mais ça, c’est sous la pression de ma mère. Elle nous faisait comprendre qu’il n’y avait rien de plus beau. Vous savez, à petite dose tous les jours, on finit par y croire.
Donc c’était simplement quelque chose qui vous était imposé ?
Je le crois. Là, je le crois, oui, maintenant, je le crois.
De plus, ma femme n’avait pas du tout les mêmes œillères ayant vécu complètement en pays arabe, depuis son enfance, Syrie, Liban, Algérie, Maroc (de 5 à 25 ans). Nous nous sommes rencontrés à l’occasion des évènements d’Algérie, au Maroc. Sa famille avait beau être catholique, ils avaient quitté le monde français de la bourgeoisie traditionnelle, et par conséquent, elle n’avait pas du tout les mêmes barrières que moi, le bourgeois Nantais, pas du tout. Elle m’a aidé à enlever mes œillères pffffuiiiiiiiiit ! et à me centrer sur l’aide des personnes dans le malheur, à faire passer l’humain avant les grands principes.
Je crois que ma foi ne devait pas être très solide. Et là je pense que je suis beaucoup plus près de mon père que de ma mère. Parce que mon père, et son père déjà -son père était radical socialiste et anti-calotin, anti-curé, au mauvais sens du terme- était complètement athée, neutre mais athée. Cela ne l’a jamais inquiété, jamais et je l’ai vu mourir, donc ça, je sais ce que je dis. Et la religion, il ne comprenait pas. Il y avait des gens qui avaient des religions ; bien ! ils avaient des religions, lui n’en avait pas et il s’en fichait complètement ; il menait sa vie comme ça. Alors ça aussi c’est très marquant.
Ce n’est pas forcément le signe d’un athéisme. C’est peut-être une tranquillité totale par rapport à Dieu.
Je veux bien. Mais pour lui, non. Ce n’était pas par rapport à un dieu, ni même par rapport à autre chose. Pour lui, il était une fourmi qui est arrivée sur la terre à un moment donné puis qui va repartir dans la terre et puis point. Sincèrement.
Moi, personnellement, je ne crois pas beaucoup à l’athéisme.
Non, mais peut-être, peut-être ça d’accord. Il y a quelque chose qui ne me va pas : je ne me vois pas du tout la fourmi qui est dans le circuit, qui disparaît et il n’y a plus rien. Cela ne me va pas du tout. Je crois en l’homme, réellement. Là vraiment, ça c’est une de mes grandes motivations, qui devait être dans les choix que je faisais, mais alors maintenant beaucoup plus clairement pour moi. C’est ça ma foi, c’est d’espérer que j’aide les gens un peu à être plus détendus, à être plus heureux, à être plus épanouis et puis on progresse petit à petit malgré toutes les merdes qu’il y a dans le monde. Cela alors, je les vois, comme vous aussi j’espère. On a envie de dire aussi, quand on voit toutes les catastrophes, est-ce que vraiment on progresse ? Là, je suis optimiste. Je crois au progrès de l’homme. En tout cas, c’est ce qui me motive dans beaucoup de choses que je fais actuellement. Même en disant cela, j’espère que j’aiderais des gens à y réfléchir. Et en espérant que ça peut aider, point.

Je fais de l’accompagnement scolaire. Je suis content de ce que je fais. Je suis heureux quand j’aide un tout petit qui est complètement exclu de l’école, qui fout le feu aux bagnoles qui brûlent à côté de chez moi, (je suis en bordure d’une grande cité). Et bien donc, là, je suis connu dans la cité, parce que je ne vais qu’à vélo, je suis rarement en voiture, et j’aide des enfants à ne plus être malheureux à l’école, à devenir heureux, et même à damer le pion aux copains ou aux profs. Sur des trucs idiots, hein, mais c’est comme ça. Et l’enfant, à partir du moment où il se sent un peu mieux, il est heureux et je suis content, point. Mais est-ce que c’est une foi ? C’est une foi dans l’homme, je veux bien. C’est là que ça se passe pour moi.
Donc pour vous, c’est être humain, avant tout être humain.
Oui, exactement. Exactement. Je souffre quand je vois autour de moi quelqu’un que je vois malheureux, emmerdé dans des problèmes psy, malheureux parce qu’il a une maladie, etc. et bien là j’ai envie de l’aider. Je ne veux pas non plus être un saint Bernard, je me limite quand même. Voilà. Bien. J’ai répondu ?
Oui, tout à fait.
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