"Equilibre et silence vont de pair."
"Le premier objectif du disciple doit être la recherche de l’équilibre. Il faut que soit définitivement établi chez lui, un point de rencontre entre le matériel et le mysticisme, entre le physique et le spirituel, de telle sorte que le mysticisme soit contrôlé par le matériel, le spirituel par le physique et vice-versa. Il n’y a pas d’autre solution pour une démarche véritable et efficace sur le sentier que ce point d’appui, ce point de jonction où doit se situer sans cesse le disciple, car c’est seulement ainsi qu’il parviendra au but. Le matériel est un point du triangle, le spirituel en est un autre, et le troisième point est le disciple lui-même qui, par conséquent, évolue efficacement et réellement, uniquement s’il prend appui sur l’équilibre des deux autres points.
"Dans le triangle formé par le matériel, le spirituel et le disciple, le quatrième point est donné par la rencontre des trois perpendiculaires abaissées de chaque pointe sur le côté opposé et en ce quatrième point, qui confère à la démarche mystique ses assises parfaites où se retrouvent, se conjuguent, les trois autres, c’est la loi du silence. C’est là que se concentrent la force et la lumière, c’est là que se produit la communion intérieure, le contact avec le Soi. Ce point central est un noyau de puissance infinie, d’équilibre absolu, de connaissance parfaite. La bible rappelle le pouvoir du silence en une formule courte mais significative : "Entre dans le silence et sache que je suis Dieu", car c’est "dans le silence" qu’on reconnaît "celui qui est" - la présence divine, le moi intérieur, le Soi.
"La pratique du silence est une obligation fréquente pour le mystique. S’écartant des agitations du mental, repoussant tout ce qui est "extérieur", il entre quelques instants en lui- même pour faire le point, c’est-à-dire recueillir la direction et la lumière du centre où convergent en une harmonieuse combinaison l’essence de toutes les données spirituelles, mentales et matérielles qui constituent son existence. Il est évident que la pratique du silence est essentiellement passive. Pour recevoir, il faut se taire et le mental doit être muet, ce qui ne signifie pas qu’aucune idée intuitive ne se manifestera et que le cours des pensées ne prendra pas une direction déterminée. C’est au contraire ce qui se produira, il n’y a pas de vide absolu. Il suffit donc d’adopter l’attitude d’un spectateur et de "voir" sans participer. Le mental n’interrompt jamais son cours pas plus que les sens ne cessent de fonctionner, mais on peut ne pas avoir conscience du travail mental ni percevoir les impressions sensorielles. Certains disent qu’ils ne peuvent pas se concentrer, qu’ils s’aperçoivent soudain que leur pensée n’a pas cessé d’errer. C’est là une erreur de compréhension. En effet, soudain ils remarquent que leur mental poursuit son œuvre et ils en concluent qu’ils ne sont pas concentrés. Mais ils oublient qu’avant ce "soudain", ils étaient "ailleurs", précisément "dans le silence de l’âme". Ce silence est rompu au moment du "soudain", c’est-à-dire quand ils se rendent compte objectivement que le mental travaille. Or, je le répète, le mental n’a jamais cessé de fonctionner même au cours de la période de silence, mais il le faisait sans qu’il y ait participation ni conscience.
"Entrer dans le silence, c’est donc ne plus participer, ne plus avoir objectivement conscience des processus mentaux et physiques dont l’activité est ininterrompue tout au long de l’existence humaine, et il est important de se souvenir que si, à un moment, on reprend conscience de ces processus, la période de silence est achevée , mais que, précédemment, on était bien "dans le silence".
"La période de silence peut ne durer que quelques secondes du point de vue humain. La durée est sans importance. Une seule seconde de vrai silence au niveau du Soi suffit à la manifestation d’une force et d’une connaissance infinies qui sans être perçues immédiatement, se développeront ensuite de mille manières dans la vie consciente sans qu’il soit possible ni nécessaire d’attribuer de tels résultats aux périodes de silence. Ce sont ces périodes que les Maîtres utilisent pour leur action, pour inciter, guider, établir les conditions d’une meilleure compréhension. C’est dans le silence de l’âme que nous œuvrons au service du disciple, pour qu’ensuite ses efforts résultent en une progression plus rapide et plus efficace.
"Tout est utile dans la voie initiatique - la théorie et la pratique, la lecture et l’expérience, la discussion et le recueillement, mais s’il y a déséquilibre, trop de théorie explicative et pas assez de pratique, trop de lecture et pas assez d’expérience, trop de discussion et pas assez de recueillement, alors l’effort est vain. Equilibre et silence vont de pair. L’un complète l’autre et lui confère sa pleine valeur.
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